Choix : pourquoi nous hésitons

Des petites décisions du quotidien aux grandes résolutions qui peuvent tout bouleverser, la vie n’est qu’une succession de choix à faire. Tant et si bien que, parfois, noyés sous des flots de possibilités, nous n’arrivons plus à savoir ce qui est bon ou pas pour nous…

Nature ou aux fruits ? Bio ou ordinaires ? Pack de deux, de quatre, de huit ? Lait de vache, de brebis, de soja ? Pots en verre, en terre cuite, en plastique ou en carton ? Aucune étude n’a encore comptabilisé le nombre de questions auxquelles notre cerveau doit répondre avant de donner l’ordre à notre main de se tendre, finalement, vers le pack de quatre yaourts bio à la framboise, en pots de verre. Ni combien de fois il doit recommencer l’exercice dans les autres rayons du magasin, jusqu’à remplissage complet d’un Caddie. Mais rien qu’en y pensant, nous comprenons mieux pourquoi il est parfois épuisant de faire les courses. Et pourquoi, certains matins, choisir comment nous allons nous habiller ou ce que nous allons manger au petit déjeuner semble un exploit insurmontable…

Nous passons notre vie entière à devoir décider. Sans arrêt. Depuis les yaourts jusqu’aux éléments majeurs de notre existence, comme la personne avec laquelle nous vivons, l’emploi que nous acceptons ou refusons, la conception d’un enfant, l’achat d’un logement remboursable sur quinze ou vingt-cinq ans, un engagement politique ou religieux… Et d’une foule d’autres choses plus ou moins importantes, mais souvent un peu inquiétantes : se faire vacciner ou pas, changer les enfants d’école, partir dans ce pays où la terre risque de trembler, accepter un devis, trouver un nouveau médecin, bousculer les convenances…

« J’ai choisi de quitter mon boulot et de changer de vie, raconte Élise, 38 ans. J’ai pris ces décisions importantes en y réfléchissant beaucoup, mais sans me sentir torturée. Seulement, le jour où il a fallu choisir un canapé pour mon nouvel appartement, j’ai complètement perdu pied. J’avais l’impression d’être incapable de savoir ce que je voulais, et même qui j’étais. Tout ça pour un canapé. »

Sans que nous comprenions toujours pourquoi, le choix devient parfois inextricable. Comme si la profusion et la liberté nous engloutissaient et nous faisaient perdre nos repères.

L’obligation d’être libre

« La grande nouveauté de notre temps, explique le psychiatre et psychanalyste Serge Hefez,auteur notamment d’Antimanuel de psychologie (Bréal, 2009), c’est qu’au lieu d’hériter de notre identité, nous nous retrouvons sommés de la choisir. Ce choix est constant, intense et douloureux… » Pendant longtemps, les individus se sont conformés à un destin défini par leur naissance : classe sociale, métier transmis de père en fils, rôle prédéterminé en fonction de leur sexe, de leur place dans la famille, de leur religion… Chacun suivait les injonctions de la société, pour en assurer la cohésion et l’équilibre, sans qu’il ne soit jamais question d’un quelconque épanouissement individuel librement décidé.

Mais les révolutions et la démocratie sont passées par là. En décrétant la liberté et l’égalité, elles ont individualisé la société, et donné à chacun la responsabilité de son développement personnel et de son propre bonheur. Et la possibilité de choisir tout ce qui, jusqu’alors, lui était imposé. À nous, désormais, de trouver le moyen de devenir des êtres libres, épanouis, harmonieux, développés. Les témoignages des Berlinois de l’Est, projetés sans préparation dans la profusion de l’Ouest au moment de la chute du mur, le 9 novembre 1989, le montrent avec émotion : « Nous ne savions plus où donner de la tête, ni quoi faire de toutes les possibilités qui s’ouvraient à nous, se souvient Helmut, âgé d’une trentaine d’années à l’époque. Tous nos repères étaient changés. Il m’a fallu du temps pour décider ce qui était bon pour moi et ce qui ne l’était pas. C’est compliqué, la liberté, quand on n’a pas l’habitude. » « La liberté est devenue un devoir, pas seulement une possibilité, argumente la philosophe Michela Marzano, auteure notamment d’Extension du domaine de la manipulation, de l’entreprise à la vie privée (Grasset, 2008). Mais en devenant une contrainte, elle se vide de son sens ! »

Nous voilà donc, parfois, totalement dépassés par l’infinité des possibilités de choix qui s’off rent à nous, et l’écrasante responsabilité qu’elle fait peser sur nos épaules. Au point de ne plus pouvoir rien décider du tout. Et même de la voir parfois se transformer en aboulie : une maladie qui enferme ses victimes dans l’incapacité chronique de contacter leurs désirs et d’exprimer une volonté…

L’impression de jouer sa vie

Dès lors que nous « décidons » de continuer à vivre (premier choix d’entre tous…), nous n’avons, en réalité, pas d’autre possibilité que de choisir. « Choisir de ne pas choisir, c’est encore faire un choix », affirmait le philosophe et écrivain Jean-Paul Sartre (In L’existentialisme est un humanisme de Jean-Paul Sartre – Gallimard, “Folio essais”, 1996)…

Comment faire, alors, pour ne pas se perdre dans la jungle de nos libertés, et se décider en toute sérénité ? Choisir s’apprend, non seulement dans l’enfance, mais aussi tout au long de la vie. Puisque celle-ci n’est rien d’autre qu’une succession de choix à faire : études, métier, conjoint, lieu et mode de vie ; avoir des enfants ou pas, et comment les éduquer… Autant d’étapes qui signent notre avancée dans la vie adulte. Et qui, de fait, nous mettent souvent dans des situations angoissantes, où nous avons l’impression de jouer notre vie. Les cabinets des psys sont remplis de couples qui viennent demander de l’aide pour se « rechoisir » ou se « déchoisir » ; les coachs font fortune en proposant d’accompagner les plus perdus dans la création de leur propre identité, visuelle, corporelle ou professionnelle. Les spécialistes en relations humaines imaginent des « carrefours de carrière » et autres bilans de compétences, pour nous aider à savoir où nous en sommes et, surtout, vers où nous pouvons ou devons aller. En perdant de vue, souvent, la question centrale du choix identitaire : avant de trouver quoi choisir, peut-être faut-il savoir qui je suis et ce que je veux.

La perte de repères collectifs

« C’est le problème majeur des personnes que je reçois, assure Philippe Esnault, coach en ressources sociales. Elles cherchent avec insistance, et souvent dans un sentiment d’urgence, la “meilleure solution”. Elles veulent tailler l’arbre, sans tenir compte de la forêt à laquelle il appartient. Ni du terrain sur lequel il est enraciné, ni du temps qu’il lui a fallu et qu’il lui faut pour se développer… »

Serge Hefez le confirme, lui aussi : « C’est difficile de se dire que tout dépend de son moi. Surtout lorsque l’on se représente celui-ci comme libre des normes sociales, familiales, culturelles. Le mythe de l’individu moderne, c’est qu’il doit être libre de toutes ces contraintes. Mais c’est impossible. » C’est ce que le sociologue Alain Ehrenberg appelle joliment « la fatigue d’être soi » : aujourd’hui, en l’absence de toute règle établie, chaque individu dépense une énergie considérable à tenter de définir les siennes, qui pourraient lui redonner une consistance. Et à poser ses propres choix, puisque plus personne n’est là pour décider à sa place.

Coachs, psys, philosophes, sociologues, tous s’accordent sur un point : pour parvenir à choisir, il faut se brancher sur son désir. Retrouver le socle profond qui constitue nos fondations, au lieu de se perdre dans l’écume des envies, sans cesse agitée par les milliers d’informations paradoxales dont nous bombarde le quotidien, et le système de surconsommation qui nous enjoint de changer très vite et très souvent d’avis. C’est en rétablissant le contact avec ce désir profond, et en lui faisant confiance, que nous pouvons reprendre les rênes de notre destin, et être capables de faire des choix dans une relative sérénité. Sans oublier d’accepter, avec cette même confiance, que nos décisions peuvent ne pas être les bonnes. Et que la plupart d’entre elles ne sont pas vitales.

« Se tromper n’est pas gâcher sa vie, rappelle Serge Hefez. On a beau s’efforcer de faire le “meilleur” choix, la manière dont les liens amoureux, conjugaux, professionnels, sociaux se façonnent finit toujours par nous échapper. » Même si c’est difficile à admettre, il semble que la manière la plus sage de rendre nos choix moins douloureux soit d’accepter que, finalement, une grande partie de leurs conséquences nous échappe !

Un mécanisme complexe

Les recherches en sciences cognitives montrent que nous prenons toutes nos décisions en deux temps, que ce soit pour choisir le parfum d’une glace ou la personne avec qui faire des enfants. D’abord, nous examinons les options disponibles, ce qui nous permet d’éliminer, assez rapidement, de nombreuses possibilités. Ensuite, nous comparons les options restantes : c’est là que tout se complique. Plus le choix nous semble important, plus nous essayons de le rationaliser. C’est la fameuse méthode d’une colonne « pour », une colonne « contre ». Qui permet de considérer les choses avec clarté, mais pas de trancher ! Sans doute parce que, dans un choix, un certain nombre de facteurs échappent à la raison : peur du risque, besoin de certitude, crainte de se sentir enfermé, même dans un bon choix ! Quant aux décisions prises en groupe, on sait depuis longtemps qu’elles sont toujours plus extrêmes que lorsqu’elles sont prises individuellement : l’histoire en regorge de preuves…

Nos remerciements à Laurent Bègue, chercheur en psychologie sociale

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L’art contemporain pour les nuls

L’art contemporain est souvent assimilé à une forme d’expression artistique complexe, élitiste et hermétique. En réalité, l’art contemporain est davantage une expression de la société et de notre époque qu’une forme d’art abscons destinée à une élite restreinte. Toutefois, définir l’art contemporain n’est pas une tâche aisée, car il ne s’agit pas d’un genre artistique homogène ou d’une esthétique bien définie.

Le terme « art contemporain » a commencé à être utilisé dans les années 1960 pour désigner l’art produit après la Seconde Guerre mondiale jusqu’à aujourd’hui. Tout comme l’art moderne, qui avait fait son apparition au cours de l’époque de la Renaissance, l’art contemporain est né d’une rupture avec les époques précédentes pour s’inscrire dans une nouvelle dynamique artistique.

Une des caractéristiques marquantes de l’art contemporain est son caractère pluridisciplinaire, qui le distingue des époques artistiques précédentes où les artistes se spécialisaient dans un mode d’expression spécifique. Ainsi, l’art contemporain peut inclure la peinture, la sculpture, la vidéo, la performance, l’installation, la photographie, etc.

L’art contemporain est également caractérisé par une grande variété de styles et de tendances, allant du réalisme à l’abstraction, en passant par l’art conceptuel, l’art minimaliste, l’art abstrait, l’art figuratif, etc. C’est cette diversité qui rend l’art contemporain si difficile à définir de manière précise.

Pour certains, l’art contemporain est davantage une critique sociale qu’une expression esthétique. Les artistes contemporains cherchent souvent à dénoncer les injustices, les inégalités, les problèmes environnementaux et les problèmes politiques de notre temps à travers leurs œuvres.

Enfin, l’art contemporain renvoie également à des pratiques artistiques nouvelles, comme l’utilisation des technologies numériques ou des médias électroniques pour créer des œuvres d’art. Ces pratiques sont récentes et n’ont pas été pleinement intégrées dans l’art contemporain, car elles se renouvellent en permanence.

En résumé, l’art contemporain se caractérise par son caractère pluridisciplinaire, sa grande diversité de styles et de tendances artistiques, sa dimension critique et sa capacité à embrasser les nouvelles pratiques artistiques. C’est cette richesse et cette complexité qui font de l’art contemporain un domaine fascinant et passionnant, mais aussi parfois difficile à appréhender pour les néophytes.

Les précurseurs de l’art contemporain

L’art contemporain est un mouvement artistique qui a commencé au début du XXe siècle et qui est toujours en évolution. Cependant, l’art contemporain a des racines qui remontent au-delà de cette période et qui ont jeté les bases de ce qui allait devenir l’un des mouvements artistiques les plus influents de l’histoire. Ces précurseurs ont créé des œuvres qui ont inspiré les artistes contemporains et ont jeté les bases de ce qui allait devenir l’art contemporain.

Le mouvement impressionniste

Le mouvement impressionniste est considéré comme l’un des premiers mouvements artistiques modernes. Il a commencé en France à la fin du XIXe siècle et a été caractérisé par une attention minutieuse aux couleurs et à la lumière. Les impressionnistes ont commencé à travailler à l’extérieur, à capturer la lumière changeante du jour, et ont utilisé des touches rapides et larges pour représenter leur sujet.

Les œuvres impressionnistes ont influencé les artistes modernes en introduisant une nouvelle façon de peindre, basée sur la perception et la sensation plutôt que sur une reproduction exacte de la réalité. Ils ont également rejeté les traditions académiques strictes et ont commencé à peindre des sujets qui reflétaient leur vie quotidienne.

Le mouvement expressionniste

Le mouvement expressionniste a commencé en Allemagne au début du XXe siècle. Les artistes expressionnistes ont cherché à exprimer des émotions fortes plutôt qu’à représenter fidèlement la réalité. Le mouvement a été caractérisé par des couleurs vives et des formes brutales, ainsi que par une attitude radicale à l’égard de la société et de l’art contemporain.

Les artistes expressionnistes ont inspiré les artistes contemporains avec leur attitude subversive et leur volonté de briser les règles établies. Les œuvres expressionnistes ont également été importantes pour la création de l’art abstrait.

Le mouvement cubiste

Le mouvement cubiste a commencé en France au début du XXe siècle. Les artistes cubistes ont rejeté la représentation traditionnelle de la perspective et ont cherché à représenter plusieurs points de vue en même temps. Les formes ont été déconstruites en fragments géométriques et réorganisées dans des compositions complexes.

Les œuvres cubistes ont eu une grande influence sur l’art contemporain en introduisant une nouvelle façon de représenter la réalité qui a rompu avec les traditions établies. Les compositions abstraites et les formes géométriques ont également été importantes pour le développement de l’art abstrait.

Le mouvement dadaïste

Le mouvement dadaïste est né pendant la Première Guerre mondiale et était caractérisé par son rejet des conventions artistiques et sociales. Les artistes dadaïstes ont créé des œuvres qui étaient anti-art, en utilisant des objets du quotidien et des techniques de collage pour créer des œuvres qui étaient souvent absurdes ou satiriques.

Les artistes dadaïstes ont inspiré les artistes contemporains en encourageant l’expérimentation et la remise en question de la réalité. Leur approche anti-art a également contribué à la création de l’art conceptuel.

Le mouvement surréaliste

Le mouvement surréaliste est né en France dans les années 1920 et a été caractérisé par son intérêt pour le subconscient et les rêves. Les artistes surréalistes ont créé des œuvres qui étaient souvent étranges et fantastiques, utilisant des techniques comme le collage et le dessin automatique.

Les artistes surréalistes ont inspiré les artistes contemporains en explorant des mondes intérieurs et inconscients. Leur approche de l’art a également été influente pour le développement de l’art conceptuel et de l’art numérique.

Conclusion

Les précurseurs de l’art contemporain ont créé des œuvres qui ont influencé les artistes contemporains et ont jeté les bases de ce qui allait devenir l’un des mouvements artistiques les plus importants de l’histoire. Les mouvements impressionniste, expressionniste, cubiste, dadaïste et surréaliste ont tous été importants pour la création de l’art contemporain en rompant avec les conventions établies et en explorant de nouvelles façons de représenter la réalité. Ces mouvements ont inspiré les artistes contemporains en leur montrant qu’il était possible de briser les règles et de créer quelque chose de nouveau et de radical.

Les principales caractéristiques de l’art contemporain

L’art contemporain est souvent considéré comme un mystère, un domaine souvent associé à des œuvres d’art abstraites que beaucoup de gens ne comprennent pas. Pourtant, il est un aspect important de l’art moderne et continue de se développer année après année. Dans ce chapitre, nous nous pencherons sur les principales caractéristiques de l’art contemporain pour vous donner une meilleure compréhension de cet art.

Le concept primordial

L’art contemporain est beaucoup plus conceptuel que les autres courants artistiques. La signification de l’œuvre d’art est souvent plus importante que son apparence physique. Les artistes contemporains créent des œuvres qui ont une signification plus profonde et qui cherchent à transmettre un message. Les artistes utilisent souvent des techniques telles que la vidéo, la photographie et les installations pour présenter une idée particulière.

La provocation

L’un des aspects les plus notables de l’art contemporain est son potentiel à choquer. Les artistes contemporains ont pour habitude de vouloir provoquer une réaction sur leur public. Les thèmes de leurs œuvres d’art sont souvent des sujets tabous tels que la sexualité, la religion, et la politique. Ils aiment aussi se sortir des sentiers battus en créant des œuvres perturbatrices, provocatrices. Après tout, l’art contemporain est un domaine qui évolue très rapidement, et les artistes contemporains cherchent toujours à trouver de nouvelles façons de surprendre et d’innover.

La transformation de la matière

Les artistes utilisent une grande variété de matériaux pour créer une œuvre d’art moderne. Cela inclut des matériaux éphémères tels que la lumière, la fumée, et des objets du quotidien, tels que les bouteilles en plastique, le fer et même des restes de nourriture. Les artistes aiment jouer avec l’utilisation de matériaux non conventionnels pour créer des œuvres d’art uniques.

L’importance de l’environnement

L’art contemporain est capable de créer un changement pour l’environnement dans lequel il est présenté. Les artistes contemporains se sont intéressés à l’idée que les œuvres d’art ne soient pas limitées à la toile, mais soient plutôt créées directement sur le site ou dans l’espace public. Les installations qui sont créées à grande échelle dans les villes sont souvent vues comme la plus grande caractéristique du mouvement de l’art contemporain. Ils sont souvent créés comme une réponse à l’environnement local et visent à amener les gens à réfléchir et à repenser leur environnement.

Le mouvement

L’art contemporain est également très intéressé par le mouvement et la cinétique. Néanmoins, cette caractéristique est souvent liée à l’utilisation de l’électronique et de la technologie. Les artistes peuvent créer des œuvres d’art qui se déplacent, changent de forme et réagissent à l’environnement dans lequel ils se trouvent. L’art contemporain est ainsi capable de créer une expérience complexe d’interaction et de communication entre l’œuvre d’art et son public.

L’usage du numérique

L’utilisation d’équipements numériques pour créer des œuvres d’art contemporain est devenue plus courante au cours des dernières décennies. Les artistes peuvent utiliser la technologie pour créer des images et des vidéos incroyables, ainsi que pour développer des installations interactives. Cela permet aux artistes de créer des œuvres d’art plus immersives et de repousser les limites de ce qui est possible.

En conclusion, l’art contemporain est un domaine créatif qui se définit par sa tendance à innover et à expérimenter. Les artistes contemporains cherchent toujours à provoquer une réaction chez leur public en créant des œuvres d’art uniques et intrigantes. Peu importe le style, l’aspect ou la forme de la pièce, l’art contemporain est avant tout un moyen de communiquer des idées, de développer des conversations sur la société, et de créer de nouvelles expériences pour les publics de tous âges et horizons.

Les courants artistiques contemporains

L’art conceptuel

Dans les années 1960, un nouveau mouvement artistique a vu le jour en rébellion à l’art traditionnel. Ce mouvement, appelé l’art conceptuel, se concentre sur l’idée et le concept plutôt que sur l’objet physique de l’art.

L’art conceptuel défie les conventions de l’art traditionnel en rejetant les critères esthétiques et en soulignant les concepts et les idées plutôt que l’apparence physique de l’œuvre d’art. Les artistes conceptuels considèrent l’art comme une expression de la pensée plutôt qu’un objet matériel. Cette idée a été résumée en 1969 par l’artiste Sol LeWitt dans son célèbre livre d’instructions, qui a déclaré que « l’art conceptuel est une idée ou une pensée exprimée de manière matérielle ou visuelle, ce qui en fait un objet d’art ».

Les artistes conceptuels utilisent souvent des supports et des matériels non conventionnels dans leurs œuvres. Ils peuvent par exemple utiliser des textes, des photographies, des vidéos, ou même des situations concrètes comme leurs supports artistiques. Cette approche de l’art peut sembler étrange à première vue, mais elle a ouvert la voie à des formes d’art innovantes et originales.

Marcel Duchamp, considéré comme l’un des précurseurs de l’art conceptuel, a été l’un des premiers à remettre en question la notion de ce que peut être considéré comme de l’art. En 1917, il a présenté une œuvre majeure intitulée « Fontaine » – un urinoir en porcelaine blanc – cela a bouleversé les conventions de l’art.

Plus tard, d’autres artistes conceptuels ont poursuivi l’œuvre de Duchamp et ont créé des pièces étonnantes dans lesquelles la forme, la structure et la présentation étaient presque secondaires à l’idée conceptuelle.

Une des œuvres les plus emblématiques de l’art conceptuel est probablement « One and Three Chairs » (« Une chaise et trois chaises »). Cette œuvre de Joseph Kosuth de 1965 se compose d’une photographie d’une chaise, d’une vraie chaise et d’une définition de dictionnaire de la chaise. Cette œuvre aborde la notion de la signification et de la définition dans l’art.

Les artistes conceptuels sont souvent considérés comme des penseurs avant-gardistes, qui ont jeté les bases de la modernité artistique.

L’art conceptuel est souvent associé au minimalisme, un autre mouvement artistique révolutionnaire du 20ème siècle qui se concentre sur la simplicité et la pureté de la forme.

Cependant, bien que le minimalisme se concentre sur la forme, l’art conceptuel se concentre sur l’idée. Les deux mouvements peuvent sembler très différents à première vue, mais leur objectif est le même : ils visent à remettre en question les traditions artistiques et à proposer une approche différente de l’art.

Un exemple célèbre de l’art conceptuel de la fin des années 60 est « Invisible Art ». Cette série d’œuvres d’art ne comporte aucune présence physique. Les artistes ont simplement présenté des idées et des concepts, sans qu’il y ait quelque chose de tangible ou de perceptible. Ces œuvres d’art ont pour objectif de remettre en question les conventions artistiques et de porter l’attention sur l’idée et la perception, plutôt que sur la présence physique de l’œuvre.

L’art conceptuel a également ouvert la voie à d’autres mouvements artistiques tels que le Land art, les installations et les performances, qui remettent également en question les conventions artistiques en cherchant à intégrer l’art dans un contexte plus large.

En conclusion, l’art conceptuel a été une évolution majeure de l’histoire de l’art. Il a bouleversé les conventions artistiques, a remis en question les critères esthétiques traditionnels et a proposé une approche différente de l’art, en se concentrant sur l’idée plutôt que sur l’objet physique. Ce mouvement a contribué à ouvrir la voie à l’innovation et à l’expérimentation dans le domaine de l’art contemporain, et a permis aux artistes de s’exprimer d’une manière plus universelle et accessible.

L’art minimaliste

L’art minimaliste est un courant artistique majeur du XXe siècle qui a influencé de nombreux artistes contemporains. Ce mouvement est né dans les années 1960 aux États-Unis et s’est rapidement propagé en Europe. L’art minimaliste se caractérise par l’utilisation de formes simples et géométriques, la réduction à l’essentiel et une grande rigueur des compositions.

Origines et contexte historique

L’art minimaliste est apparu dans un contexte historique particulier aux États-Unis en pleine période de l’après-guerre. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’art américain a pris une place prépondérante sur la scène internationale. Les artistes américains ont commencé à critiquer la tradition artistique européenne considérée comme suranné et ont cherché de nouvelles formes d’expression. C’est dans ce contexte que l’art minimaliste est né.

Les origines de l’art minimaliste remontent aux œuvres de l’artiste Kazimir Malevitch, fondateur du mouvement suprématiste en Russie dans les années 1910. Ce mouvement a influencé de nombreux artistes avant-gardistes, notamment aux États-Unis avec des artistes tels que Barnett Newman, Mark Rothko ou encore Ad Reinhardt.

Principales caractéristiques de l’art minimaliste

L’art minimaliste se caractérise avant tout par une économie de moyens et une recherche de la simplicité. Les artistes minimalistes emploient des formes simples et épurées, souvent géométriques. Les formes sont limitées à des cubes, des rectangles, des carrés ou des cercles.

L’usage de matériaux industriels et manufacturés est récurrent. Ce mouvement a cherché à rompre avec la tradition artistique qui valorise le savoir-faire, le travail de l’artisan, en utilisant des matériaux bruts et standardisés. Les matériaux, tels l’acier, le béton, le verre, le plexiglas ou l’aluminium reflètent l’esprit de l’industrialisation.

Les œuvres sont souvent réalisées selon un principe tout simple mais efficace, par la répétition d’une même forme ou d’une même structure. L’art minimaliste privilégie ainsi les formes plates et les couleurs unies, souvent froides et neutres.

L’art minimaliste est donc en opposition avec l’expressionnisme abstrait qui a fait de New York le centre de l’art contemporain dans les années 1950. Cet art cherchait à exprimer des émotions, des sentiments, des sensations par des gestes spontanés et des formes libres.

Artistes majeurs de l’art minimaliste

Carl Andre est considéré comme l’un des artistes majeurs de l’art minimaliste. Il a réalisé des sculptures à partir de matériaux tels que des briques, de simples plaques d’acier ou de cuivre. Son œuvre Steel Carl Andre, est une sculpture composée de 120 plaques d’acier, de formes plates, assemblées selon un principe très simple.

Dan Flavin est un autre artiste minimaliste américain célèbre. Il a créé des installations lumineuses dont la forme est simple et répétitive. Il a utilisé essentiellement des tubes fluorescents de couleurs diverses, des néons, des lampes et des ballasts. Flavin cherchait à explorer la perception unidimensionnelle de l’espace et l’interaction de la lumière et de la couleur.

Donald Judd est l’un des fondateurs de l’art minimaliste. Il a réalisé des boîtes, des cubes en acier brut, de couleurs unies, simples et élémentaires. Judd a créé une série de sculptures minimalistes dans les années 1960, qu’il a installée dans un espace unique, le château de Marfa, au Texas.

Le travail de Sol LeWitt est également emblématique de l’art minimaliste. Il a réalisé des dessins muraux, appelés les wall-drawings, avec une rigueur et une précision géométrique. LeWitt a utilisé des formes simples, des lignes droites, des motifs géométriques, des carrés et des cercles.

Impact sur l’art contemporain

L’art minimaliste a eu une influence considérable sur l’art contemporain. En effet, ce mouvement a introduit la rigueur et la simplicité dans l’art contemporain et a contribué à l’émergence de nouvelles formes d’expression. Ainsi, cet art a ouvert de nouvelles perspectives sur l’utilisation des matériaux industriels dans l’art, mais aussi sur la relation entre l’art et l’espace.

Les artistes contemporains ont repris les principes et les caractéristiques de l’art minimaliste dans leurs œuvres. Ainsi, le travail de l’artiste belge Wim Delvoye, qui utilise des techniques industrielles pour réaliser des sculptures de grande taille en acier et en béton, est une évolution directe de l’art minimaliste.

De même, les sculptures de l’artiste anglo-nigérian Yinka Shonibare, en tissu africain coloré et très travaillé, sont des variations sur les sculptures minimalistes mais avec une touche personnelle et culturelle non négligeable.

Conclusion

L’art minimaliste est un courant artistique majeur qui a eu un impact considérable sur l’art contemporain. Ce mouvement a introduit la rigueur, la simplicité et l’économie de moyens dans l’art. Les artistes minimalistes ont utilisé des formes géométriques simples, des couleurs unies et ont créé des sculptures avec des matériaux manufacturés.

L’art minimaliste a également ouvert de nouvelles perspectives artistiques en relation avec l’espace et les matériaux. Ainsi, ce mouvement a contribué à l’émergence de nouveaux courants artistiques, tels que l’art conceptuel ou l’art numérique. Aujourd’hui encore, l’art minimaliste continue d’inspirer de nombreux artistes contemporains qui reprennent les principes de l’art minimaliste et les réinterprètent à leur manière.

L’art abstrait

L’art abstrait est un mouvement artistique moderne qui a vu le jour à la fin du XIXe siècle. Ce mouvement se caractérise par l’utilisation de formes et de couleurs abstraites sans qu’il y ait nécessairement de représentation figurative. L’art abstrait est considéré comme l’un des mouvements les plus importants de l’histoire de l’art contemporain.

Les origines de l’art abstrait

Les origines de l’art abstrait remontent au début du XXe siècle, lorsque des artistes comme Wassily Kandinsky, Kazimir Malevitch, Piet Mondrian et Fernand Léger ont commencé à rechercher de nouvelles façons d’exprimer leur créativité. Ces artistes se sont rendu compte que la représentation figurative ne permettait pas de transmettre toutes les émotions et les sentiments qu’ils cherchaient à exprimer.

Le terme « abstrait » vient du latin « abstrahere », qui signifie « soustraire » ou « détacher ». L’idée de l’art abstrait est de détacher l’œuvre d’art de toute représentation figurative ou narrative pour se concentrer sur les couleurs, les formes, les lignes et les textures. C’est ainsi que sont nés les premiers mouvements de l’art abstrait.

Les mouvements de l’art abstrait

L’art abstrait est un mouvement très riche, qui a donné lieu à de nombreuses sous-catégories. Voici quelques-uns des principaux mouvements de l’art abstrait :

  1. L’art abstrait lyrique

L’art abstrait lyrique est un mouvement qui a vu le jour en France dans les années 1940. Il se caractérise par l’utilisation de couleurs vives et de formes organiques. Les artistes de ce mouvement cherchent à exprimer des émotions et des sentiments à travers leur travail.

Les artistes les plus connus de l’art abstrait lyrique sont Georges Mathieu, Jean-Paul Riopelle et Joan Mitchell.

  1. L’expressionnisme abstrait

L’expressionnisme abstrait est un mouvement qui a vu le jour aux États-Unis dans les années 1940. Ce mouvement se caractérise par la densité des couleurs et des formes, qui sont souvent utilisées de manière spontanée et intuitive.

Les artistes les plus connus de l’expressionnisme abstrait sont Jackson Pollock, Mark Rothko et Willem de Kooning.

  1. L’art cinétique

L’art cinétique est un mouvement qui a vu le jour dans les années 1950. Il se caractérise par l’utilisation de formes géométriques et de lignes qui créent des illusions d’optique et des mouvements visuels. C’est un mouvement qui a cherché à intégrer le mouvement et la lumière comme éléments clés de l’œuvre d’art.

Les artistes les plus connus de l’art cinétique sont Carlos Cruz-Diez, Victor Vasarely et Julio Le Parc.

  1. L’art minimaliste

L’art minimaliste est un mouvement qui a vu le jour dans les années 1960. Il se caractérise par l’utilisation de formes géométriques simples, de couleurs unies et de matériaux industriels. Les artistes de ce mouvement cherchent à créer des œuvres d’art qui sont réduites à leur essence la plus pure.

Les artistes les plus connus de l’art minimaliste sont Donald Judd, Sol LeWitt et Dan Flavin.

Les artistes de l’art abstrait

Wassily Kandinsky est considéré comme le fondateur de l’art abstrait. Né en Russie en 1866, il a vécu en Allemagne et en France avant de s’installer définitivement en 1933 à Neuilly-sur-Seine, près de Paris. Kandinsky est connu pour avoir développé la théorie de l’art abstrait et pour avoir créé les premières œuvres abstraites.

Kazimir Malevitch est un autre artiste majeur de l’art abstrait. Né en Ukraine en 1878, il est connu pour son tableau « Carré noir sur fond blanc », qui est devenu l’emblème de l’art abstrait.

Piet Mondrian est un artiste néerlandais qui est célèbre pour ses peintures abstraites composées de lignes noires, de carrés et de rectangles colorés. Sa recherche d’une expression artistique universelle l’a conduit à créer des compositions qui équilibrent la tension entre les couleurs et les formes.

Fernand Léger est un artiste français qui est célèbre pour ses peintures abstraites qui s’inspirent de la vie moderne. Il a également expérimenté avec la sculpture abstraite, créant des œuvres d’art qui sont à la fois abstraites et figuratives.

Les œuvres d’art abstrait

Les œuvres d’art abstrait expriment souvent des émotions et des sentiments difficiles à transmettre par les mots. En utilisant la couleur, la forme et la texture, les artistes créent des compositions qui invitent le spectateur à se laisser emporter par les sensations. Voici quelques-unes des œuvres d’art abstrait les plus célèbres :

  1. « Composition VIII » de Wassily Kandinsky

« Composition VIII » est une œuvre d’art abstrait créée par Wassily Kandinsky en 1923. Cette peinture se caractérise par la complexité de ses formes et de ses couleurs, qui créent un effet visuel puissant. Kandinsky a créé cette œuvre en utilisant des formes géométriques simples combinées à des formes organiques.

  1. « No. 61 (Rust and Blue) » de Mark Rothko

« No. 61 (Rust and Blue) » est une œuvre d’art abstrait créée en 1953 par Mark Rothko. Cette peinture se caractérise par l’utilisation de couleurs profondes et saturées qui évoquent des émotions intenses. Rothko a créé cette œuvre en superposant des couches de peinture jusqu’à créer un effet de profondeur.

  1. « SP 251 » de Sol LeWitt

« SP 251 » est une œuvre d’art abstrait créée en 1989 par Sol LeWitt. Cette sculpture se caractérise par l’utilisation de formes géométriques simples en acier inoxydable. LeWitt a créé cette sculpture en utilisant des algorithmes mathématiques pour déterminer la composition des formes.

Conclusion

L’art abstrait est un mouvement artistique majeur qui a vu le jour au début du XXe siècle. Ce mouvement se caractérise par l’utilisation de formes et de couleurs abstraites sans qu’il y ait nécessairement de représentation figurative. L’art abstrait peut prendre de nombreuses formes différentes, allant de la peinture à la sculpture en passant par l’installation et la performance. Les œuvres d’art abstrait cherchent souvent à transmettre des émotions et des sentiments intenses en utilisant la couleur, la forme et la texture. Les artistes de l’art abstrait sont des figures majeures de l’histoire de l’art contemporain et ont contribué à créer un mouvement artistique qui continue d’inspirer les artistes du monde entier.

L’art figuratif

L’art figuratif est un courant artistique qui a dominé pendant des siècles, dépassé plus récemment par l’art abstrait. Cependant, malgré sa popularité décroissante, l’art figuratif reste encore présent dans l’univers artistique actuel.

Définition de l’art figuratif
L’art figuratif est un courant artistique qui représente des sujets identifiables, tels que des personnes, des objets ou des paysages, en utilisant des techniques réalistes. Il est le contraire de l’art abstrait qui ne représente rien de figurable et s’appuie plutôt sur les concepts et les pensées.

Les origines et l’histoire de l’art figuratif
L’art figuratif remonte à l’histoire de l’humanité car, dès l’Antiquité, les artistes grecs et romains y ont eu recours pour représenter des personnes (par exemple, les sculptures équestres de Marcus Aurelius), des divinités (Athéna) ou encore la vie quotidienne (la mosaïque du butin de la chasse). L’art figuratif s’est également révélé important pendant la période de la Renaissance, avec des peintres comme Michel-Ange, Léonard de Vinci ou encore Raphaël qui étaient reconnus pour leur technique réaliste et leur capacité à rendre l’apparence humaine dans les moindres détails.

Au XXe siècle, l’art figuratif a subi une transformation importante, avec l’arrivée de l’Expressionnisme allemand qui a introduit une représentation plus émotionnelle et personnelle des personnages. Plus tard, pendant les années 1960, les peintres pop art comme Andy Warhol ont popularisé l’art figuratif, prenant pour modèle des images d’objets de la vie quotidienne pour les reproduire sur leur toile.

L’art figuratif aujourd’hui
Bien que l’art figuratif ne soit plus l’un des courants artistiques les plus en vue dans l’ère contemporaine, il est toujours présent et continue d’évoluer. De nombreux artistes ont maîtrisé la technique réaliste et continuent de la développer avec des sujets variés.

Dans les années 80 et 90, de nombreux artistes figuratifs ont commencé à exploiter l’imagerie populaire du passé – tels Jeff Koons ou Richard Prince – pour produire des œuvres d’art qui semblent être familières pour les spectateurs, mais qui sont (dans de nombreux cas) luxueuses, colorées et avec une dimension saisissante.

En 2021, certains artistes contemporains se concentrent sur la représentation de la figure humaine dans leur travail. Michael Borremans, un artiste belge, peint des personnages sous forme de portraits ou de nus avec une technique réaliste qui plonge le spectateur dans une atmosphère à la fois sinistre et fascinante. À l’inverse, le peintre britannique Jenny Saville crée de grands tableaux de corps nus surdimensionnés et imparfaits.

Outre la peinture, l’art figuratif peut être découvert dans d’autres domaines comme la sculpture, la photographie et l’installation.

Conclusion
L’Art figuratif est un courant artistique fort qui a marqué notre histoire et dont l’influence est toujours perceptible aujourd’hui. Bien qu’il ne soit plus le courant le plus marquant de l’art contemporain, il continue de fasciner les artistes et les spectateurs. Dans chaque époque, les artistes ont su utiliser les techniques les plus modernes pour interpréter et évoquer les sujets les plus divers, réels ou imaginaires. De ce fait, l’histoire de l’art figuratif continue de s’écrire encore aujourd’hui.

L’art numérique

L’art numérique est l’une des formes les plus récentes de l’art contemporain. Il a commencé à émerger dans les années 1950 et 1960, lorsque les artistes ont commencé à utiliser des ordinateurs et des technologies numériques pour créer des œuvres d’art. L’art numérique est souvent considéré comme une forme de média art, car il utilise des technologies nouvelles et en constante évolution pour créer des œuvres d’art.

Les artistes numériques travaillent avec une grande variété de médias, y compris la vidéo, l’animation, la réalité virtuelle, la sculpture et bien d’autres encore. Leur travail peut refléter des idées et des concepts évoluant avec l’avancement des technologies. Ils peuvent également se concentrer sur des thèmes liés à la technologie, tels que la vie numérique, la surveillance et l’identité.

L’art numérique peut être créé à l’aide de logiciels informatiques ou de matériel électronique, y compris des ordinateurs, des tablettes et des appareils photo numériques. Les artistes peuvent utiliser des programmes de modélisation 3D pour créer des sculptures virtuelles et des environnements numériques, ou utiliser des logiciels de traitement d’image et de vidéo pour créer des animations et des vidéos.

Une caractéristique clé de l’art numérique est sa capacité à être facilement adapté et modifié grâce à l’utilisation de logiciels. Les artistes peuvent facilement ajouter des éléments à leurs créations numériques ou en changer les couleurs, les formes et les textures. Cela peut rendre leur travail plus dynamique et évolutif, reflétant les nouvelles tendances technologiques et les développements économiques qui y sont associés.

L’art numérique offre également des possibilités en termes de présentation et de distribution des œuvres d’art. Les artistes peuvent facilement partager leur travail avec un public mondial en le publiant sur Internet ou en créant des installations interactives qui permettent aux spectateurs de s’engager avec les œuvres d’art numériques.

Les artistes numériques peuvent également explorer des concepts liés à la technologie, notamment la manière dont elle peut affecter notre vie quotidienne et notre perception du monde qui nous entoure. Certaines œuvres d’art numérique peuvent être provocantes et stimulantes, invitant les spectateurs à réfléchir à leur propre relation avec la technologie et leurs interactions avec l’environnement numérique.

Enfin, l’art numérique peut également être utilisé pour créer des environnements immersifs, tels que des installations vidéo ou des expériences de réalité virtuelle. Ces projets peuvent permettre aux spectateurs de se plonger dans un autre monde et de découvrir les œuvres d’art de manière plus immersive et interactive.

En somme, l’art numérique est une forme d’art contemporain en constante évolution qui utilise des technologies numériques pour explorer des idées nouvelles et provocantes. Les artistes numériques travaillent avec une grande variété de médias et peuvent se concentrer sur des thèmes liés à la technologie et à l’environnement numérique. Cette forme d’art offre également des possibilités en termes de présentation et de distribution des œuvres d’art, permettant aux artistes de partager leur travail avec un public mondial et de créer des environnements immersifs pour les spectateurs.

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Autisme et empathie

L’empathie chez les personnes « Asperger »

La stigmatisation du manque absolu d’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger rend invisible la véritable sensibilité de ces personnes. Parce qu’au-delà de ce que l’on peut croire, elles ressentent, voient et apprécient les émotions des autres…

La stigmatisation du manque d’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger est encore bien ancrée dans notre société. Cependant, les neurosciences nous disent très clairement que les enfants, les adolescents et les adultes atteints du syndrome d’Asperger ressentent la douleur des autres, la voient, l’apprécient et s’en soucient. Cependant, ils ne savent pas comment réagir, quelles réponses ou quels comportements adopter dans ces situations.

Il est tout à fait possible que les films et les émissions de télévision aient contribué à donner une image qui n’est généralement pas très réaliste des troubles dans le spectre de l’autisme (TSA). Pour commencer, le fait le plus important à considérer est que, comme le mot lui-même l’indique, nous avons affaire à une condition qui se rattache à un spectre.

Il y aura donc des personnes aux comportements beaucoup plus rigides. Certaines auront de grandes difficultés, même en matière de parole et de communication. D’autres, en revanche, feront preuve de bonnes capacités de fonctionnement et de mémoire. Ces personnes auront probablement un grand potentiel dans certains domaines de connaissance. Il peut s’agir par exemple du domaine des sciences ou des mathématiques.

Par conséquent, tous les enfants atteints de TSA ne sont pas les mêmes. Bien que le syndrome d’Asperger soit le plus fréquent dans ce spectre, la généralisation conduit toujours à l’erreur. Ce trouble du développement requiert de notre part plus de compréhension et de proximité. Il est donc nécessaire de comprendre un peu plus comment fonctionne ce monde intérieur lié à l’empathie.

L’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger : concepts et caractéristiques

Comment l’empathie se manifeste-t-elle chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger ?
Est-elle absente chez ces personnes ou est-elle présente de la même manière que chez les personnes neurotypes (généralement des personnes qui développent un TSA) ? La réponse n’est pas aussi simple qu’un “oui” retentissant ou un “non” définitif. Le sujet n’est pas simple car l’empathie, en soi, n’est pas une dimension aussi simple qu’on pourrait le penser.

Voyons maintenant quelques informations importantes.

Deux types d’empathie

Christopher Gillberg est professeur à l’université de Göteborg, en Suède. Il est connu pour avoir développé les critères les plus courants pour diagnostiquer le syndrome d’Asperger. Ce médecin définit souvent ce trouble du développement comme la “maladie de l’empathie”.

Mettre l’accent uniquement sur cette idée, c’est nourrir les stigmatisations de la communauté. En réalité, ce qui doit être clarifié, c’est que l’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger fonctionne différemment.

  • L’empathie se présente de deux façons : la première est cognitive. Grâce à elle, nous avons la capacité de voir le monde du point de vue d’un tiers. Nous comprenons ce qui lui arrive parce que nous pouvons nous “mettre à la place” de la personne qui se trouve devant nous
  • D’autre part, il y a l’empathie émotionnelle : dans ce cas, nous nous limitons à ressentir ce que l’autre personne ressent. Nous vivons donc une contagion émotionnelle. En effet, nous voyons, nous sentons et nous nous connectons, mais nous ne comprenons pas la situation. Et si nous la comprenons, c’est grâce à la coalition avec l’autre type d’empathie, celle qui est cognitive
  • C’est ce que vit une personne ayant le trouble d’Asperger : elle peut identifier la souffrance et la joie de l’autre, et même la partager. Cependant, elle ne sait pas comment réagir, quoi faire ou comment agir. Son empathie cognitive n’est pas toujours présente

Les neurosciences et le syndrome d’Asperger

Le Centre de recherche sur le cerveau de l’Université nationale Yang-Ming, à Taipei, Taiwan, a mené une étude intéressante en 2014. L’objectif de l’étude était de déterminer grâce aux IRM comment le cerveau des personnes atteintes du syndrome d’Asperger fonctionne.

  • Ainsi, une chose que l’on pourrait constater est que l’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger et les mécanismes qui en sont responsables, sont bien présents. Les processus liés à l’identification de la douleur d’autrui sont donnés. Ils sont réels, mais pas de la même manière que chez les personnes neurotypiques
  • Ces différences sont en partie expliquées dans un article publié dans la revue Molecular Autism. Le professeur Baron-Cohen, du Centre de recherche sur l’autisme de l’université de Cambridge, a mené une étude pour découvrir la présence d’un gène. Le gène GABRB3 pourrait être à l’origine de ces altérations de l’empathie

Ce gène régule également le fonctionnement d’un neurotransmetteur appelé acide gamma-aminobutyrique (GABA). De cette façon, l’altération de sa fonctionnalité peut engendrer des comportements plus rigides. Par exemple, cela peut être le cas d’une hypersensibilité aux stimuli mais aussi de la difficulté à comprendre ou à se mettre à la place des autres.

Cependant, il y a un autre fait encore plus intéressant. L’altération de ce gène n’est pas exclusive au groupe atteint de TSA (trouble du spectre autistique). Nous pouvons tous présenter une variante du GABRB3 et ainsi montrer certaines limites en termes d’empathie.

L’hypersensibilité dans l’autisme Asperger ou le phénomène de “l’excès d’empathie”

Ce fait est très intéressant. Les chercheurs Henry et Kamila Markram, neuroscientifiques israéliens, soulignent que l’un des problèmes des personnes autistes est l’hypersensibilité à l’expérience. Tout est trop intense et accablant. Le monde a trop de stimuli, trop de sons, de lumières, d’odeurs, de sensations…

Ainsi, et aussi frappant que cela puisse paraître, le monde émotionnel est également trop chaotique pour elles. Tout est vécu de manière excessive et douloureuse. Par conséquent, elles souffrent souvent d’un excès d’anxiété.

Cependant, selon ces scientifiques, les personnes atteintes du syndrome d’Asperger peuvent quand même éprouver les sentiments des autres. Néanmoins, elles les ressentent trop fortement et se bloquent. Parfois, elles ne savent pas comment réagir ou quoi faire.

Ce sentiment n’est pas agréable. Elles se sentent dépassées et évitent donc le contact visuel. Elles se détournent et ont tendance à éviter certaines situations sociales parce que ces scénarios sont trop intrusifs pour leurs sens.

Finalement, l’empathie chez les personnes atteintes du syndrome d’Asperger est réelle. En effet, elle existe et elle est belle et bien présente. Cependant, cela fonctionne différemment. C’est quelque chose que nous devons donc comprendre. Le monde interne de ces personnes n’est pas facile. C’est pourquoi elles ont besoin de notre sensibilité, de notre respect et de notre alliance. Cela leur permettra donc de s’intégrer dans notre vie quotidienne à leur propre rythme, à leur manière et avec leur propre vision de la vie.

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La folie n’est-elle que le contraire de la raison ?

Notre époque y voit une pathologie, mais envers de la raison, elle nous inspire ambitions, amours et plaisirs.

La folie est la chose du monde la mieux partagée, « le plus vif de nos dangers, dit Foucault, et notre vérité peut-être la plus proche ». Si la folie n’était qu’une maladie mentale, si le fou n’était que l’insensé, il suffirait d’être sain d’esprit pour ne pas être fou. Or la folie a les idées plus larges : personne n’est plus fou que celui qui, croyant ne pas l’être, exclut, d’autorité, la folie du cercle de la raison. La folie clinique, caractérisée, n’est qu’un cas particulier d’une folie plus générale qui, si elle était reconnue comme telle, enverrait tout homme à l’asile. C’est ce dont témoigne le cas Descartes, ou l’histoire d’un homme qui, redoutant de trop douter, bannit la possibilité de la folie au départ de ses méditations. « Mais quoi ? ce sont des fous, et je ne serais pas moins extravagant si je me réglais sur leurs exemples », écrit-il en parlant de ceux qui « assurent constamment qu’ils sont des rois, lorsqu’ils sont très pauvres ; qu’ils sont vêtus d’or et de pourpre, lorsqu’ils sont tout nus ; ou s’imaginent être des cruches, ou avoir un corps de verre ». En voulant être sobre, en remplaçant l’épreuve du vertige par la stabilité des certitudes, en excommuniant la folie comme on dépouille la lumière de son ombre, en faisant une idole de son esprit au point de considérer que le fou ne peut penser puisque la pensée ne peut être folle, le philosophe dément dénie à la folie (qu’il réduit à la déraison) le privilège des paroles inouïes, fonde la folie « comme l’autre de la raison, selon le discours de la raison elle-même » (Foucault), et justifie, à ce titre, la mainmise des fous qui s’ignorent sur les malades mentaux qu’ils enferment. C’est méconnaître sa propre folie (comme c’est méconnaître l’altérité en soi) que de faire de la folie l’objet de la connaissance et, par conséquent, du fou (successivement identifié, selon l’époque, à l’homosexuel, à l’étranger, au vagabond ou à l’hystérique) l’objet de la surveillance. Parce qu’elle se limite elle-même à l’exercice de la raison, la philosophie, affolée par la folie, se soumet à sa loi dès qu’elle prétend s’en éloigner. « Nous sommes si nécessairement fous, soutient Pascal, que ce serait être fou par autre tour de folie, de n’être pas fou » : la paranoïa de ceux qui, désireux de penser par eux-mêmes, refusent d’être manipulés, l’engendrement du goût de l’absolu par les idées de la raison, le geste logique de celui qui, en toute rigueur, déduit de la mort de Dieu que tout est permis, le recours au raisonnement qui accompagne les affirmations les plus téméraires démontrent, si besoin est, qu’il faut avoir perdu la tête pour faire de la raison un garde-fou.

Car la folie n’est pas seulement le langage des exclus, mais le fin mot de l’existence. C’est elle qui (contrairement à l’absurde) épargne le suicide à ceux dont la vie n’a aucun sens. C’est elle qui, donnant aux hommes le goût du pouvoir et de l’argent, préserve les sociétés de l’anarchie comme de la misère. C’est elle qui défait les tyrans qu’elle a mis sur le trône. La folie apprend à aimer le silence, à désirer ce qui ne dure pas, à parler légèrement des choses graves, à souffrir sans se plaindre. Le plaisir, à cet égard, est une folie, l’amour aussi, le bonheur ne l’est pas moins : « De même que son ignorance grammaticale ne saurait rendre malheureux le cheval, dit Érasme dans sa prosopopée de la folie, je ne fais point le malheur de l’homme, puisque je suis conforme à sa nature… Si les mortels se décidaient à rompre avec la Sagesse, et vivaient sans cesse avec moi, au lieu de l’ennui de vieillir, ils connaîtraient la jouissance d’être toujours jeunes… Qu’y a-t-il de plus doux, de plus précieux, que la vie elle-même ? Et à qui doit-on qu’elle commence, sinon à moi ?… à mesure que l’homme m’écarte, il vit de moins en moins. »

La folie est un lieu de passage, à mi-chemin de l’erreur et du rêve, une prodigieuse réserve de sens où la littérature – à qui rien de ce qui est fou n’est étranger – puise le délire qui enchante, épuise les paradoxes qui rassurent, accueille et restitue l’étrange parole des clairvoyants, conserve aux mots la saveur qu’ils perdent en retrouvant leur étymologie. Aux antipodes de Descartes, l’écrivain est un foulosophe qui, avant de juger, choisit de comprendre, c’est-à-dire, étymologiquement, « de ne pas exclure »…

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Le symbolisme du voyage

Le symbolisme du voyage, particulièrement riche, se trouve au coeur de nombreuses légendes : Ulysse, Hercule, Ménélas, Sindbad le marin, le cycle du Graal, La Pérégrination vers l’Ouest, etc.

Plus près de nous, les écrivains, explorateurs et aventuriers (réels ou imaginaires) perpétuent la force mythique du voyage : Saint-Exupéry, Jules Vernes, Théodore Monod…

Le voyage exprime un certain rapport au temps et à l’espace. Il évoque la découverte, la progression, l’ouverture ; il se traduit toujours par un changement d’état.

Voyager, c’est partir à la découverte du monde, mais aussi à la découverte de soi-même, les deux chemins ayant vocation à se rejoindre.

Le voyage constitue toujours une aventure philosophique et spirituelle. Il permet d’éclairer les grandes questions existentielles : d’où viens-je ? qui suis-je ? où vais-je ?

La vie, dans le sens d’existence terrestre, peut se définir comme un voyage. Nous voyageons tous, tout le temps, même lorsque nous restons statiques. Nous pouvons alors nous questionner : qu’est-ce que la vie a à nous apprendre ? que peut-on apprendre de la vie ?

Le voyage évoque aussi celui de l’âme après la mort : on pense par exemple au Livre des morts des Egyptiens ou au Livre des morts tibétain. Ce peut être le chemin du paradis ou de l’Enfer, de la libération ou de la souffrance éternelle.

Nous allons voir que le voyage peut être abordé par sa dimension intérieure (connaissance de soi) ou extérieure (connaissance du monde, du cosmos, de Dieu).

Entrons dans le symbolisme du voyage et sa signification profonde.

Le voyage répond d’abord à un appel, qui peut être intérieur ou extérieur, évident ou inattendu. Ce peut être l’appel de l’autre, de la curiosité, celui de la foi ou du coeur, ou encore l’appel du destin.

Au départ, le voyage est parfois une fuite (le plus souvent née d’une insatisfaction) qui se confond avec un désir de liberté, de conquête ou de possession.

Cet état initial, immature et inconscient, évolue au fil des épreuves dans le sens d’une maturation, d’une ouverture, d’une prise de conscience. Le voyage constitue ainsi la voie de la sagesse et de la libération, dans le sens d’une libération de soi.

Par ailleurs, le voyage est toujours une plongée vers l’inconnu. A ce titre, le mot « pérégrination » évoque un voyage lointain vers des contrées mystérieuses. Le voyage se déroule sur un territoire étranger, qu’on ne maîtrise pas et sur lequel on n’a aucun droit.

D’autre part, toute odyssée comporte des risques, des obstacles, des difficultés, des énigmes à résoudre. Le mot « tribulation » traduit cette suite d’aventures et de péripéties.

Le voyageur frôle régulièrement la mort : il navigue sur des océans profonds, traverse des forêts sauvages, des déserts, double des caps, franchit des fleuves déchainés… L’omniprésence de la mort lui rappelle sa véritable condition.

Le voyage correspond toujours à une quête de soi, qu’elle soit au départ consciente ou inconsciente.

Voyager, c’est se rencontrer soi-même, ce qui rappelle le titre d’une célèbre émission de radio : Là-bas si j’y suis. Le voyage oblige en effet à se confronter au regard des autres, et donc à porter un œil neuf et plus objectif sur soi-même.

De façon générale, le voyage invite au doute. Il incite à se remettre en cause, à abandonner ses certitudes et ses préjugés.

Ainsi, le véritable sens du voyage est celui d’une déconstruction : c’est un chemin qui recule, un retour à l’état primordial, authentique. Le voyage est alors synonyme d’abandon, de dépouillement : peu à peu, le voyageur prend conscience de sa nature véritable, essentielle ; il redevient lui-même.

Le voyage est la métaphore la plus évidente de l’élévation spirituelle. Une élévation synonyme de progrès, d’évolution, de montée vers les Cieux.

Cette ascension est celle de l’âme : elle ne peut se faire qu’en abandonnant nos illusions dues à notre attachement à la matière. Il ne s’agit pas ici de rejeter la matière, mais de l’aborder sous un angle plus universel.

Dans la culture chinoise, le voyage mène vers l’Ile des immortels, l’Ile de vérité, l’Ile de pureté, ou encore vers le mont Kouen-Louen, centre et axe du monde.

Le symbolisme du voyage évoque la quête : quête de Connaissance, de vérité, de paix et d’immortalité, quête d’un trésor intérieur, ou tout simplement quête de Soi.

C’est dans tous les cas la recherche d’un point d’équilibre, d’un centre spirituel, paisible, éternel et immuable.

Cela rappelle bien sûr la quête du Graal, objet mythique que l’on associe à la coupe ayant reçu le sang du Christ, et qui correspond en fait à un état intérieur par lequel l’individu s’ouvre à Dieu.

Le Graal est un élixir qui procure paix et immortalité, puisque la peur de la mort disparaît.

En philosophie et dans les rituels ésotériques, le voyage initiatique se définit comme celui qui passe par la mort. Nous parlons ici d’une mort symbolique qui correspond à l’abandon des certitudes et de l’ancien « moi ».

L’initiation évoque le franchissement d’une porte : c’est opérer une métamorphose, c’est passer d’un état à un autre, s’ouvrir et grandir.

Le voyage initiatique est au coeur de la symbolique maçonnique : il est le moteur de la progression de l’initié.

C’est en effet en accomplissant plusieurs voyages que le néophyte pourra accéder, s’il y est prêt, aux secrets de la Connaissance.

Sur le chemin, il sera invité à abandonner ses passions ainsi que les certitudes attachées à sa zone de confort. Il entrera dans une nouvelle démarche consistant à marcher de la périphérie vers le centre : le centre de Soi. Certes, la voie est ponctuée d’obstacles et d’épreuves, mais le néophyte pourra compter sur l’aide et le soutien des mains fraternelles.

Comme dans la plupart des rites religieux, le voyage maçonnique s’accomplit en trois grandes étapes :

  • la préparation,
  • l’épreuve à vivre, qui se solde par une mort symbolique,
  • et la renaissance.

Le voyage maçonnique évoque aussi le processus de transformation alchimique.

Au final, le voyage représente l’épreuve qu’il faut traverser pour accéder au centre caché en soi, point de vérité ultime.

Il s’agit donc d’un voyage intérieur, qui consiste à traverser le chaos de notre univers mental. Le voyageur devra déchirer le voile de ses illusions pour enfin oser se regarder en face… au-delà de l’épreuve, il y a la promesse d’un éternel bonheur.

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Différence entre réalité et vérité

Quelle est la différence entre vérité et réalité ? Définitions philosophiques. Pourquoi la vérité n’est-elle pas forcément la réalité ?

La connaissance de la vérité et de la réalité sont des problématiques centrales en philosophie. Or, vérité et réalité sont des notions qui se recoupent mais ne se confondent pas :

  • la vérité touche à la logique et à la raison,
  • la réalité touche aux choses, c’est-à-dire à la matière.

Voyons la différence entre vérité et réalité.

La différence entre vérité et réalité : définitions philosophiques.

La vérité désigne un discours valide, juste, conforme. Mais conforme à quoi ?

La vérité peut être définie comme ce qui est conforme à la réalité, perçue ou objective.

Mais elle peut aussi désigner ce qui est conforme :

  • à la logique,
  • à l’intuition,
  • à la conscience,
  • à la morale,
  • à l’opinion commune,
  • à des croyances ou des convictions propres (dans une vision relativiste, la vérité peut en effet être personnelle),
  • ou à plusieurs de ces éléments à la fois.

De fait, la vérité ultime est difficile à définir et encore plus à atteindre.

Au final, on distinguera plusieurs types de vérités :

  • la vérité logique : construite sur un raisonnement abstrait, irréfutable mais risquant d’être “hors-sol”,
  • la vérité scientifique : elle s’appuie sur des preuves expérimentales ; mais l’histoire a montré qu’il n’y avait pas de vérité scientifique définitive,
  • la vérité révélée : c’est le dogme religieux, la foi, ou encore la révélation intérieure intuitive.

L’homme-sujet étant dans l’incapacité de saisir la réalité telle qu’elle est, la vérité se cantonne souvent à la logique. On en arrive à une distinction de plus en plus marquée entre vérité et réalité :

  • la vérité concerne le rapport à la logique : un discours est jugé vrai ou faux,
  • la réalité concerne le rapport aux choses : les choses sont réelles ou non, existent ou n’existent pas.

Le risque est qu’un fossé de plus en plus grand se creuse entre vérité et réalité : par exemple, un discours peut être vrai sur le plan logique, tout en étant totalement déconnecté de la réalité. Le raisonnement peut donc se perdre et s’éloigner du terrain.

Mais nous n’avons pas encore défini ce qu’est la réalité.

Qu’est-ce que la réalité ?

Il faut en réalité distinguer la réalité du réel :

  • le réel est ce qui existe en soi, indépendamment du sujet, c’est-à-dire indépendamment de ses perceptions et de ses pensées,
  • la réalité est ce qu’un individu perçoit et comprend du réel. On distingue :
    • la réalité empirique : c’est ce qui existe pour nous à travers nos sens, notre expérience, bref nos rapports avec la matière,
    • la réalité intelligible : c’est ce que nous comprenons du monde par notre pensée, notre raisonnement, nos concepts abstraits.

Pour Platon, il convient de préférer le monde des idées au monde des perceptions, c’est-à-dire la raison à l’expérience. Cependant, Platon, dans une vision à la fois réaliste et idéaliste, ne nie pas l’existence du réel, contrairement par exemple aux philosophes du courant immatérialiste.

Réconcilier vérité et réalité.

En s’intéressant à la recherche de la vérité, les philosophes ont parfois eu trop tendance à oublier la réalité.

Or, plutôt que de cultiver une vérité hors-sol, il s’agit de réconcilier la vérité avec la réalité, en évitant deux écueils :

  • le relativisme, qui consiste à dire que chacun perçoit sa réalité et peut créer sa propre vérité,
  • le dualisme, qui consiste à séparer vérité et réalité.

Par ailleurs, la réalité ne doit pas être qu’un critère de vérité parmi d’autres.

Au final, le philosophe devrait adopter une définition équilibrée de la vérité, selon laquelle le discours vrai doit être probant à la fois sur le plan rationnel et sur le plan empirique.

La voie de la sagesse.

Pour conclure, arrêtons les définitions suivantes :

  • le réel est le monde tel qu’il est, indépendamment de l’observateur,
  • la réalité est le monde tel qu’il apparaît aux yeux de l’observateur,
  • le vrai est l’ordre du cosmos, indépendamment de l’observateur,
  • la vérité est ce que l’observateur saisit de l’ordre du cosmos.

Le sage comprendra qu’il ne peut y avoir d’écart entre le réel et le vrai : l’ordre du cosmos exprime une perfection à la fois spirituelle et matérielle, les deux aspects étant indissociables.

A l’inverse, sur le plan individuel, il peut y avoir un écart entre réel, réalité, vrai et vérité.

Pour limiter ces écarts, le sage devra plonger en lui-même afin d’identifier les causes de ses illusions. L’introspection l’amènera à visiter son psychisme pour extraire ce qui fait obstacle à l’expression de la part universelle de son être.

Dépouillé de ses préjugés, de son ego et de ses conditionnements, le sage se réconciliera avec toute chose. Il découvrira le réel en lui comme une évidence : il fait partie du monde.

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L’erreur peut nous faire progresser. Qu’en est-il de l’illusion ?

Dans les deux cas l’esprit a un rapport imaginaire à la vérité. Il erre loin d’elle mais si dans l’erreur il se trompe, on peut dire que dans l’illusion il est trompé. L’une est le signe d’un manque de connaissance et l’aveu d’une imprudence de l’esprit. (Sauf dans la recherche scientifique où le risque de l’erreur est instrumentalisé pour discriminer le vrai du faux). L’erreur est donc la marque d’une faiblesse.  L’illusion est plutôt l’expression de la force de certaines puissances trompeuses s’exerçant sur l’esprit et l’égarant.

    L’erreur procède d’ordinaire d’un défaut ou d’un manque de connaissance. Elle est imputable à la volonté qui se permet d’affirmer quelque chose alors qu’elle n’en a pas les moyens théoriques. D’où la nécessité d’éviter la prévention et la précipitation,comme le conseille Descartes, afin de ne pas juger à tort et à travers. Lorsque l’entendement a fait la lumière sur une question, l’erreur est rectifiée et remplacée par une connaissance vraie.

   Si l’on prend acte de la démarche scientifique on s’aperçoit qu’il y a une fécondité de l’erreur dans la mesure où l’esprit ne s’enferme pas en elle. Il prend le risque de se tromper pour éliminer les erreurs et s’approcher de la vérité. Aussi soumet-il ses idées au contrôle expérimental, et progresse-t-il dans sa recherche de la vérité en rectifiant, en surmontant ses erreurs.

   Ce n’est pas le cas avec l’illusion. Il ne suffit pas de la dénoncer pour la faire disparaître. En témoignent les illusions d’optique. Je sais bien que ce n’est pas le soleil qui tourne autour de la terre, cela ne m’empêche pas d’en avoir l’illusion. Je sais bien que je vais mourir, cela ne m’empêche pas d’avoir l’illusion d’être éternel.

   L’illusion consiste (illudere : se jouer, se moquer de) à prendre des fictions pour des réalités. Tout se passe comme si l’esprit était le jouet de quelque chose qui agit sur lui et lui fait prendre l’apparence des choses pour les choses elles-mêmes ou la vraisemblance pour la vérité. Cela signifie que l’esprit ne s’exerce pas de manière autonome. Sans une difficile ascèse, il est sous l’empire de tout ce qui agit sur lui à son insu : les impressions sensibles, les désirs, les intérêts, les passions, les conditionnements divers et variés. Cf. Platon et l’idée des chaînes maintenant l’esprit prisonnier de la caverne. Dans l’allégorie, le philosophe établit qu’en ce sens toutes nos erreurs sont des illusions.

 Dans le texte qui suit, Freud distingue l’erreur, l’illusion et l’idée délirante pour montrer que l’illusion n’est pas nécessairement en désaccord avec la réalité, qu’elle n’est pas nécessairement une erreur (ce qui est problématique dans la mesure où l’on ne parle plus d’illusion lorsqu’il y a accord entre la représentation et la réalité). Mais Freud veut établir que le propre de l’illusion est d’être dérivée des désirs humains. Elle est ordonnée à d’autres requêtes que celles de l’esprit. Son enjeu n’est pas la connaissance de ce qui est mais la satisfaction du principe du plaisir (opposable à principe de réalité).  « Nous appelons illusion une croyance quand, dans la motivation de celle-ci, la réalisation d’un désir est prévalente »

   Il s’ensuit que l’illusion est réfractaire à la confrontation au réel. Sauf exception, les illusions idéologiques, sentimentales ont ceci de terrible qu’elles ne sont pas « biodégradables » par l’expérience, elles résistent à tous ses démentis.

   Proust disait en ce sens : « Les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances, ils n’ont pas fait naître celles-ci, ils ne les détruisent pas ; ils peuvent leur infliger les plus constants démentis sans les affaiblir, et une avalanche de malheurs ou de maladies se succédant sans interruption dans une famille ne la fera pas douter de la bonté de son Dieu ou du talent de son médecin » Du côté de chez Swann, Pléiade, I, p. 148.

   Les illusions sont vraiment une prison en ce qu’elles sont l’effet-cause de l’aliénation radicale de l’esprit. Elles témoignent de la subversion de la raison par la dimension sensible de l’humaine nature.

  « Une illusion n’est pas la même chose qu’une erreur, une illusion n’est pas non plus nécessairement une erreur. L’opinion d’Aristote, d’après laquelle la vermine serait engendrée par l’ordure – opinion qui est encore celle du peuple ignorant –, était une erreur; de même l’opinion qu’avait une génération antérieure de médecins, et d’après laquelle le tabès aurait été la conséquence d’excès sexuels. Il serait impropre d’appeler ces erreurs des illusions, alors que c’était une illusion de la part de Christophe Colomb, quand il croyait avoir trouvé une nouvelle route maritime des Indes. La part de désir que comportait cette erreur est manifeste. On peut qualifier d’illusion l’assertion de certains nationalistes, assertion d’après laquelle les races indo-germaniques seraient les seules races humaines susceptibles de culture, ou bien encore la croyance d’après laquelle l’enfant serait un être dénué de sexualité, croyance détruite pour la première fois par la psychanalyse. Ce qui caractérise l’illusion, c’est d’être dérivée des désirs humains ; elle se rapproche par là de l’idée délirante en psychiatrie, mais se sépare aussi de celle-ci, même si l’on ne tient pas compte de la structure compliquée de l’idée délirante.
      L’idée délirante est essentiellement – nous soulignons ce caractère – en contradiction avec la réalité; l’illusion n’est pas nécessairement fausse, c’est-à-dire irréalisable ou en contradiction avec la réalité. Une jeune fille de condition modeste peut par exemple se créer l’illusion qu’un prince va venir la chercher pour l’épouser. Or, ceci est possible ; quelques cas de ce genre se sont réellement présentés. Que le Messie vienne et fonde un âge d’or, voilà qui est beaucoup moins vraisemblable : suivant l’attitude personnelle de celui qui est appelé à juger de cette croyance, il la classera parmi les illusions ou parmi les équivalents d’une idée délirante. Des exemples d’illusions authentiques ne sont pas, d’ordinaire, faciles à découvrir ; mais l’illusion des alchimistes de pouvoir transmuter tous les métaux en or est peut-être l’une d’elles. Le désir d’avoir beaucoup d’or, autant d’or que possible, a été très atténué par notre intelligence actuelle des conditions de la richesse ; cependant la chimie ne tient plus pour impossible une transmutation des métaux en or. Ainsi nous appelons illusion une croyance quand, dans la motivation de celle-ci, la réalisation d’un désir est prévalente, et nous ne tenons pas compte, ce faisant, des rapports de cette croyance à la réalité, tout comme l’illusion elle-même renonce à être confirmée par le réel. »

                               Freud, L’Avenir d’une illusion.

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Philosophie du dépouillement. La pauvreté rend-elle heureuse ?

Introduction : Le terme cynique a bien changé de sens.

Le cynisme est une attitude face à la vie provenant d’une école philosophique de la Grèce antique, fondée ou du moins inspirée par Antisthène1 et connue principalement pour les propos et les actions spectaculaires de son disciple le plus célèbre, Diogène de Sinope. Cette école a tenté un renversement des valeurs dominantes du moment, enseignant la désinvolture et l’humilité aux grands et aux puissants de la Grèce antique. Radicalement matérialistes et anticonformistes, les cyniques, et à leur tête Diogène, proposaient une autre pratique de la philosophie et de la vie en général, subversive et jubilatoire. L’école cynique prône la vertu et la sagesse, qualités qu’on ne peut atteindre que par la liberté. Cette liberté, étape nécessaire à un état vertueux et non finalité en soi, se veut radicale face aux conventions communément admises, dans un souci constant de se rapprocher de la nature. Le cynisme a profondément influencé le développement du stoïcisme par Zénon de Kition et ses successeurs à partir de 301 av. J.-C.

Revenons à nos moutons !

Pourquoi choisir la pauvreté ?

Par choix, Diogène vit dans la pauvreté et le dénouement. Par conviction, Diogène vit sans possession ni attache. Il développe une philosophie du dépouillement, où il se dépossède de tout, pour être plus proche de lui-même.

Pour les cyniques, la pauvreté est une vertu ; a contrario, la richesse est à proscrire. Ne rien posséder permet de se détacher des choses matérielles, et ainsi accéder à la liberté. On ne peut, en même temps, avoir et être. La seule richesse est l’autonomie. Le pauvre est celui qui désire plus qu’il ne peut acquérir. Vivre en autarcie correspond à l’idéal stoïcien, aussi bien qu’à l’idéal des cyniques.

« La vertu ne saurait habiter dans une ville, ni une maison riche »

L’avoir épuise l’être. Les possessions finissent par nous posséder. L’autosuffisance est le seul bien à rechercher. Pour y accéder, il convient de se satisfaire du minimum : une alimentation frugale, un logement sommaire, le moins de possessions possible. Lorsque Platon brime Diogène en un « Socrate devenu fou », il fait référence à cette ascèse radicale, à ce mode de vie marginal, à cette promotion de la pauvreté.

Quel est le mode de vie prôné par les cyniques ?

La fin que se propose la philosophie cynique est le bonheur. Ce bonheur consiste à vivre conformément à la nature. La quête de liberté des cyniques est directement inspirée par le modèle animal. Toutefois, l’être humain ne doit pas se réduire à la bestialité, à la barbarie, mais à la nature. Le modèle cynique est plutôt celui d’une vie minimaliste, inspirée de la vie à l’état sauvage.

Les cyniques encouragent à mener une vie simple et naturelle. Vertu et bonheur sont permis par une vie ascétique, en accord avec la nature. D’ailleurs, étymologiquement, cynisme (kinikos) signifie chien. Les cyniques vivent et se présentent comme des chiens. Diogène se félicitait ainsi de son surnom de « chien », donné par ses détracteurs.

D’après les cyniques, la liberté humaine ne diffère point de celle du chien. Diogène « aboie devant les ignorants et lèche les sages » (Baldacchino, 2014, p.74). Diogène, dont le surnom fut le chien, loge dans son célère tonneau, devenu le symbole du principe d’autarcie. En fait, il dormait dans un pithos, une grande jarre (il n’y avait pas de tonneau en bois à son époque). Ses possessions se limitent à un bâton (qui a une utilité pédagogique), une lanterne, et une coupe. A ce propos, on raconte que Diogène, à la vue d’un enfant qui buvait avec sa main, jeta son écuelle de colère.

Les cyniques prônent une alimentation tout juste suffisante (eau, herbes), un logement spartiate (abris de fortune), de vieux vêtements (Diogène porte un manteau élimé et abîmé), une apparence négligée (cheveux longs, barbes non entretenues), la mendicité et l’aumône…

Dès l’antiquité grecque, les hommes se voyaient aliénés par des besoins superfétatoires, des pressions sociales normalisantes, des exigences aliénantes. Altérés par la vie sociale, les besoins individuels doivent retrouver leur simplicité naturelle. L’homme doit parvenir à se défaire de ces contraintes pesantes. La raison doit l’emporter sur les passions (biologiques, comme sociales). La vie conforme à la nature se spécifie par l’absence de contraintes. Les besoins sociaux entravent la réalisation de la nature.

La pensée cynique voit dans le monde pré-prométhéen, un modèle à suivre, un monde naturel où l’être humain est libre. L’homme doit s’émanciper de la dictature civilisationnelle, qui le corrompt en besoins superflus.

Diogène se vante d’« être riche sans une seule obole » et s’enorgueillit d’être sans cité, sans maison, privé de patrie, vagabond, mendiant, vivant au jour le jour. Après avoir vu un enfant boire sans écuelle, Diogène se comprit battu. Il se débarrassa alors de son récipient. De même, Cratès, digne représentant de l’école Cynique et grand héritier, se débarrassa de sa fortune, en la donnant aux citoyens de Thèbes. Elève de Diogène, Cratès choisit également le dépouillement comme mode de vie, comme le souligne Plutarque :

« Cratès avec seulement son sac et sa cape en lambeaux, rit à la vie en plaisantant, comme s’il était toujours à un festival ».

Cratès su mettre en conformité ses principes de vie avec sa pratique. En abandonnant sa fortune, il s’affranchit d’un obstacle à sa liberté. La pauvreté, de même que la discipline du désir, constituent une condition à la liberté. La pauvreté serait ainsi le principe de son indépendance. Plus que les mots et les longs discours, la négation du matériel, le refus des honneurs, le rejet de la fortune, forment les meilleurs arguments pour défendre une philosophie de vie.

L’ascèse radicale et le choix sans ambages de la pauvreté des représentants du cynisme ont pour objet de les libérer. L’idéal philosophique des cyniques est la vie autarcique.

Comment se délester pour se libérer ?

Sans possession, sans attache, sans besoin superflu, Diogène vit libre, loin de tout chagrin ou crainte, comme le souligne Epictète. En cela, il était marginal face aux athéniens, qui ne cessaient de se soucier de leurs biens, de comploter pour assurer leur survie, de travailler pour obtenir récompenses et honneurs… Incapable de goûter le moindre repos salvateur, les contemporains de Diogène enduraient souffrances et angoisses. A ces peurs, Diogène opposait son bien souverain, l’indépendance. Vivant en autarcie, Diogène se suffisait à lui-même, et ne dépendait de rien, ni de personne. Les cyniques placent « la liberté au-dessus de tout ».

La société de consommation, la profusion de biens, la pression aux achats ostentatoires, interrogent forcément à l’aune de la philosophie cynique. Peut-on être véritablement libre dans le démonstratif et le superflu de notre société marchande ?

La liberté cynique, comme stoïcienne par ailleurs, se gagne sur le terrain de la retenue, de la discipline du désir. Diogène prescrit de réduire ses besoins au minimum vital. En ce sens, le sage est celui qui se satisfait de peu. Ne rien posséder permet de se rapprocher de soi. La réussite est un combat intérieur, permettant de s’affranchir des besoins non-nécessaires. On observe dans quelle mesure cette sagesse antique s’oppose catégoriquement à l’extériorisation du désir, à la débridation des désirs des sociétés modernes occidentales.

En outre, la liberté cynique enjoint de mettre à distance les règles normatives, les lois, les bonnes mœurs, les us et coutumes… Ces contraintes représentent des sources de servitude. Diogène développe une pensée profondément contestataire et irrévérencieuse. Son objet est de subvertir la morale commune, de renverser les idéaux partagés. La liberté est donc également un travail de mise en perspective des forces sociales coercitives. Le sage ne se soumet point à la doxa populaire. La liberté doit sans cesse se défendre contre les besoins corporels et les normes sociales.

Se libérer consiste à abandonner les modes de vie et de pensées ordinaires. Le sage vit en décalage, en marge des cadres restrictifs et des pratiques quotidiennes de ses contemporains. C’est par le fait même qu’il ne se soucie pas le moins du monde du regard inquisiteur porté par les autres sur sa façon d’être, qu’il est indépendant. Est donc libre celui qui ne vit plus emprisonné par le jugement social.

Peut-on établir un lien entre pauvreté, (auto)création ?

Les objets réduisent l’homme en servitude. L’être est limité par ses avoirs. Les besoins de possessions en plus de faire souffrir et endurer mille épreuves inutiles, éloignent l’homme de lui-même. Par le désir d’acquérir, l’individu passe de créateur à imitateur. Dans la société prométhéenne, l’homme devient alors un produit non-réflexif de sa civilisation. Son être s’épuise, à mesure qu’il succombe à la recherche du profit. A contrario, à l’état sauvage de l’ère pré-prométhéenne, les hommes seraient libres de créer, par l’absence de codes et de règles normatives.

La création de soi implique nécessairement de faire abstraction de la mimétique des désirs, du regard évaluateur des autres. Le processus d’autocréation doit mettre à mal les dynamiques normalisantes. L’homme souverain, par définition, ne s’établit pas selon des standards, mais s’érige en vertu de ses propres critères, en fonction de ses règles personnelles.

De la sorte, la richesse et l’autocréation s’opposent à deux niveaux :

  • La quête effrénée de biens, l’appât du gain, ne peuvent que détourner l’individu de ses richesses intérieures. Rechercher le succès extérieur, c’est renoncer à toute possibilité de victoire sur soi-même. Devenir maître des soi implique un travail d’introspection, un regard dirigé vers son for intérieur, alors même que l’ambition dans les affaires entraîne un mouvement vers l’extérieur ;
  • En outre, les possessions finissent par nous posséder. Plus j’ai, moins je suis. S’affranchir des objets, vivre de manière minimaliste, permet également de faire le vide en soi, condition nécessaire à sa liberté intérieure.

A titre d’illustration, dans l’histoire de la pensée, on ne peut qu’être frappé par la concomitance entre l’austérité et le génie. Dans Ethique à Nicomaque, Aristote condamne la chrématistique, c’est-à-dire l’accumulation de monnaie pour elle-même. L’art de s’enrichir s’oppose déjà à l’art du bien-être (oïkos). Il s’agirait là d’une activité contre nature. De même, bien plus tard, Nietzsche condamne la passion effrénée de l’avoir et des honneurs, la recherche de l’enrichissement pour lui-même. Dans Ainsi parlait Zarathoustra, il écrit (p.70) : 

« En vérité, qui possède peu est d’autant moins possédé : louée soit la petite pauvreté ».

En pratique, à titre d’exemplification, on peut parler des grands génies philosophiques, qui ont renoncé à une fortune certaine, au profit d’une vie incertaine. Spinoza et Wittgenstein ont ainsi refusé l’héritage familial.

En 1656, Spinoza fut exclu de sa communauté religieuse. De là, il abandonna la succession de son père et les affaires familiales. Spinoza devint alors un « philosophe-artisan », qui gagna sa vie très humblement en taillant des lentilles optiques pour lunettes et microscopes. Il mènera une vie modeste et frugale, qui le conduira à rédiger quelques-uns des plus grands textes philosophiques.

De même Wittgenstein, héritier d’une fortune colossale abandonna son héritage, qu’il remettra à ses frères et sœurs, ainsi qu’à des artistes d’avant-garde. Il pensait que donner son argent aux pauvres et nécessiteux ne pourrait que les corrompre. En se délestant sciemment de ce legs familial, Wittgenstein a provoqué son propre appauvrissement, et connaîtra une vie très ascétique. Il gagna humblement sa vie en étant tour à tour jardinier ou instituteur. C’est dans l’isolement et la réclusion choisie qu’il écrira ses plus grands textes.

En dehors du champ philosophique, on peut citer Albert Einstein, comme symbole du « pauvre génie ». De 1900 à 1905, soit les années les plus prolifiques de son existence au niveau intellectuel, il vivait dans une grande précarité, voire même une certaine misère. C’est pourtant éloigné du milieu universitaire, où règne un conformisme sans pareil, qu’il élabora la plus grande théorie de la physique du XXe siècle. L’histoire de la pensée nous enseigne donc que pauvreté et (auto)création font bon ménage. Il y a déjà 2500 ans, Diogène incitait à se suffire à soi-même, à se détacher de l’envie, de l’avoir, du désir. Le cynisme renverse ainsi les préjugés, toujours et plus que jamais vivace, concernant la réussite, la liberté et la fortune. La richesse, c’est de renoncer aux désirs ; la pauvreté est d’en être esclave.

Guillaume Vimeney

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La beauté dans l’art : une œuvre d’art est-elle nécessairement belle ?

Quel est le rapport entre l’art et la beauté ? L’art ne vise-t-il que le beau ? Une oeuvre d’art doit-elle forcément plaire ? Voici une approche philosophique de la beauté dans l’art.

L’art a longtemps consisté en la seule recherche de la beauté.

Dans la Grèce antique, Apollon, dieu des arts, de la poésie, de la musique et de la beauté, conduisait les neuf muses présidant aux arts libéraux :

  • Calliope (poésie épique),
  • Clio (histoire),
  • Erato (poésie lyrique et érotique),
  • Euterpe (musique),
  • Melpomène (tragédie et chant),
  • Polymnie (rhétorique),
  • Terpsichore (danse),
  • Thalie (comédie),
  • Uranie (astronomie).

La vision antique consiste donc à associer l’art à la recherche de l’harmonie et de la perfection. La beauté relève alors de critères universels : l’équilibre, la symétrie, les proportions, l’harmonie des formes, l’harmonie des sons, la maîtrise des savoirs ou encore la pureté.

La Renaissance voit le développement des beaux-arts (dessin, peinture, sculpture, architecture, mais aussi musique, poésie, théâtre et danse), dont la finalité est encore la beauté au sens classique.

Les beaux-arts ont pour principal objet l’expression sensible de l’harmonie plastique. Le but est de produire un plaisir esthétique tout en répondant à un idéal de beauté, défini comme une forme de vérité.

Cependant, l’art n’a pas toujours recherché le beau.

La finalité de l’art.

En peinture, la laideur s’exprime dès le XVIème siècle avec Jérôme Bosch (Le portement de la Croix), Quentin Metsys ou encore Bartolomeo Passarotti (Le vieux Couple et Joyeuse compagnie).

Le Bacchus de Rubens (1630) est particulièrement laid. L’esthétisme reste toutefois recherché, même dans la laideur, la vulgarité ou l’obscénité.

Mais ce sont les artistes du XIXème siècle qui ont définitivement dissocié l’art de la beauté classique, notamment en peinture :

  • les réalistes ont d’abord tenté une représentation brute et réelle de la société, en opposition avec le romantisme et le néo-classicisme,
  • les naturalistes ont eu à cœur de représenter des scènes de la vie quotidienne, sans filtre,
  • les impressionnistes se sont écartés des canons classiques pour peindre les impressions ressenties, c’est-à-dire les choses telles qu’elles nous apparaissent à l’esprit, non idéalisées,
  • plus tard, les fauvistes, expressionnistes, cubistes, symbolistes, dadaïstes et surréalistes créeront de nouvelles manières d’exprimer leurs idées, s’écartant souvent du « diktat » de la beauté.

Le but est désormais de représenter le monde tel qu’il est, tel qu’on le perçoit, tel qu’on l’interprète ou tel qu’on le juge. La peinture devient le miroir du monde et de la pensée de l’artiste. L’art ne doit plus être nécessairement beau, mais authentique.

Aujourd’hui, la beauté n’est plus un critère pour définir la qualité d’une œuvre d’art. Beaucoup d’œuvres sont disharmonieuses, dérangeantes voire choquantes : leur finalité est ailleurs.

Comment définir l’art ?

L’art est une pratique consciente par laquelle l’homme tend à une certaine fin, à un certain objectif. Le résultat de cet effort est un objet reconnu par tous comme une « œuvre d’art », c’est-à-dire un objet sans utilité concrète, mais doté d’une valeur morale ou spirituelle.

L’art est un moyen d’expression. L’œuvre d’art vise à produire un effet psychologique chez celui qui la regarde.

L’art touche à la sensibilité, à l’intellect, mais aussi à la philosophie et à la spiritualité.

La beauté dans l’art est-elle encore utile ?

Nous l’avons vu, l’artiste contemporain ne vise plus forcément la beauté esthétique. Son but est avant tout d’exprimer ses idées et sa créativité : l’art ne se fixe plus aucune limite à l’exploration.

Ce que l’artiste recherche, c’est la puissance d’évocation, le message, la signification, le sens, et si possible un sens durable. Une œuvre d’art réussie est souvent une œuvre d’art qui éclaire le sens de la vie.

Mais en s’écartant de l’impératif de beauté, l’artiste prend le risque de diminuer la force de son message : son œuvre, malgré son authenticité, risque d’être plus difficile à regarder et à comprendre.

Car la recherche du sens de la vie est indissociable de l’expression de la beauté. En effet, en tant que force active qui organise le chaos, La vie est en quête permanente d’ordre et d’harmonie. Elle véhicule des valeurs à partir desquelles l’artiste doit se positionner, sans quoi il risque de tomber dans le nihilisme.

De la beauté de l’œuvre à la beauté de l’artiste.

Certes, l’art s’est affranchi de la recherche de la beauté. Mais l’intention de l’artiste doit rester pure et désintéressée. L’art est une quête : cette quête doit être sincère et tournée vers les autres.

Prenons l’exemple de Pierre Soulages, le peintre de l’outre-noir : au cours de sa carrière, ses œuvres sont devenues de plus en plus sombres, puis entièrement noires. Une quête mystique qui l’a conduit à retrouver la lumière dans le noir : c’est l’outre-noir. Le sens n’est-il pas évident ?

Au final, toute œuvre d’art, même si elle n’est pas esthétiquement belle, doit refléter une certaine forme de beauté : beauté de la démarche, grandeur du message, génie de l’artiste, capacité à ouvrir la conscience, recherche d’un idéal nouveau.

La beauté n’est pas que plaisir ; elle peut, comme la vérité, être troublante, brutale ou triste. Elle peut aussi être sublime.

L’art et la beauté : citations.

La beauté est un mode d’éclosion de la vérité. Heidegger

L’art est beau quand la main, la tête et le cœur travaillent ensemble. John Ruskin

L’œuvre d’art ne s’obtient que par contrainte et par la soumission du réalisme à l’idée de beauté préconçue. André Gide

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La violence vue par les philosophes

La violence est un thème clé en philosophie politique. Physique ou symbolique, individuelle ou étatique, la violence est un concept protéiforme.

Le point commun de ces formes de violence est le suivant : toute violence repose sur la volonté de soumettre quelqu’un, contre sa volonté, par le recours à la force. La violence est donc une suspension de la légalité.

Si la plupart des penseurs rejettent la violence au nom du respect des individus (Sartre, Alain) ou du pacifisme (Kant, Derrida, Arendt), certains philosophes (Marx, Engels, Nietzsche, Hegel) ont souligné le rôle moteur de la violence dans l’avancée des sociétés ou des rapports humains :

  • Chez Hegel, la lutte des consciences permet à l’individu de se poser en tant que tel. Sans opposition, la conscience ne peut parvenir à la réflexivité.
  • Chez Sartre, l’existence même d’autrui est violence en ce qu’il porte un regard, une objectivité sur moi. Cette violence me permet néanmoins d’entrer en communication avec autrui.
  • Chez Marx, la violence permet d’accoucher d’une société libre, de renverser les rapports de classes.
  • Chez Weber, la violence est nécessaire à l’exercice de l’autorité de l’Etat.
  • Chez Machiavel, elle peut se justifier si l’objectif de la violence est la paix.

Sur la violence au cinéma, voir Orange Mécanique de Stanley Kubrick

Citations sur la violence

  • La violence n’est pas un moyen parmi d’autres d’atteindre la fin, mais le choix délibéré d’atteindre la fin par n’importe quel moyen (Sartre)
  • Un acte de justice et de douceur a souvent plus de pouvoir sur le cœur des hommes que la violence et la barbarie (Machiavel)
  • Un Etat est une communauté humaine qui revendique le monopole de l’usage légitime de la force physique sur un territoire donné (Weber)
  • Je m’oppose à la violence parce que lorsqu’elle semble produire le bien, le bien qui en résulte n’est que transitoire, tandis que le mal produit est permanent (Gandhi)
  • Il ne serait pas exagéré de définir la violence comme une force faible (Jankélévitch)
  • Tous les États-nations naissent et se fondent dans la violence. Je crois cette vérité irrécusable. Sans même exhiber à ce sujet des spectacles atroces, il suffit de souligner une loi de structure : le moment de fondation, le moment instituteur est antérieur à la loi ou à la légitimité qu’il instaure. Il est donc hors la loi, et violent par là-même (Derrida)
  • Etre politique, vivre dans une polis, cela signifiait que toutes choses se décidaient par la parole et la persuasion et non par la force ni la violence (Arendt)
  • Il y a des moments où la violence est la seule façon dont on puisse assurer la justice sociale (Eliot)

Et pour finir la violence dans le sport :

Battling Joe pour le plaisir

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